SPOLIER un grand propri�taire et b�tir des logements sociaux sur son domaine, quelle belle id�e. De celles qu’on accueille avec un sourire agressif, la revanche des gueux sur le poss�dant, une histoire de morale publique.
D’autant que la ville de Hy�res, o� le maire (de droite) a engag� la proc�dure d’expropriation en question, �tait toujours point�e comme "mauvaise �l�ve" au palmar�s de la fondation Abb� Pierre en 2008, avec un taux de logements sociaux d’� peine 11% quand la loi en impose 20. Saluons donc la d�marche visant � r�tablir un certain �quilibre dans une r�gion sinistr�e.
Sauf que nous n’y sommes pas du tout.
Le propri�taire que l’on voudrait exproprier est agriculteur. Sa famille cultive des fleurs depuis plusieurs g�n�rations sur 8000 m� de terres aujourd’hui promises au label ZAE (Zone d’Activit� �conomique). Il n’est pas le seul ma�tre des lieux : deux autres chanceux se partagent plus de 80% de la future ZAE (qui s’�tendra sur 270.000 m�). D’un c�t� la soci�t� Casino qui souhaiterait pousser les murs d’un �tablissement d�j� en place, de l’autre le PDG du supermarch� Leclerc install� un peu plus loin mais qu’il voudrait d�placer ici pour �conomiser un loyer. Sous les applaudissements du maire et du pr�sident de l’agglom�ration toulonnaise (vous savez, l’ancien secr�taire d’�tat � l’am�nagement du territoire).
Et cette histoire de logements ?
Il faut savoir que l’expropriation n’est possible que s’il y a d�claration d’utilit� publique, et que dans la d�finition floue de "l’utilit� publique", la construction de logements sonne particuli�rement bien. Il se trouve que l’agriculteur n’a pas du tout envie de partir. Pas grave : les concepteurs de la ZAE ont opportun�ment choisi l’emplacement des terrains agricoles et de la maison familiale pour de futurs am�nagements et des appartements dont rien ne dit d’ailleurs, dans le document pr�sent� lors de la r�union de concertation du 9 septembre 2008, qu’ils seront � destination des familles les plus d�favoris�es. Remarquez, il y a peu de chances que monsieur Lecourt, PDG du Leclerc et propri�taire des terrains en question, ait lui-m�me envie d’habiter les demeures qui jouxteront son enseigne sans vue sur la mer ni piscine, la louze totale.
R�sumons : �lus et notables de la grande distribution d�cident d’implanter une gigantesque zone commerciale � l’entr�e de Hy�res. Taxe professionnelle, hyper-consommation et m�me, avec un peu de chance, ouverture le dimanche, ah mon dieu je crois que je vais jouir. Pour virer les derniers g�neurs et b�tonner leurs renoncules, on accompagne le projet commercial d’une annexe habitat pr�voyant la construction de trois petits immeubles. On gagne ainsi sur tous les tableaux : l’id�al UMP d’une vie urbaine sans boue sous les roues du 4x4 quand tu fais les courses le week-end, et "l’enjeu de l’opinion publique" via la construction d’une r�sidence et d’un parc avec des balan�oires. Sans oublier la cr�ation d’emplois d’h�tesses d’accueil, de techniciens de surface et de sp�cialistes en manutention. S’ils le souhaitent, les anciens fleuristes pourront postuler.
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