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LETTRE D'INFORMATION |

Petit trait� de gestion de crise � l’usage des chefs d’�tablissement

mercredi 26 avril 2006
par Denis Collet
O� l’on verra qu’un d�put� peut tr�s bien se substituer aux forces de l’ordre en temps de crise. O� l’on verra qu’une association para-�ducative administr�e par ce m�me d�put� et un proviseur de lyc�e public peut tr�s bien profiter de la crise � condition d’en sortir.

DEUXI�ME semaine de mars, Villepin boude d’un ton tr�s solennel. Les �tablissements de l’agglom�ration toulonnaise peinent � assurer la continuit� du service public d’�ducation, plus ou moins bloqu�s par des �l�ves qui ne veulent pas entendre parler du CPE. Le lyc�e Langevin de la Seyne-sur-Mer n’�chappe pas � la r�gle : aucun cours n’y sera dispens� entre le 17 mars et le 10 avril.

Gestion de crise, crise de gestion

L’incurie et la p�rilleuse incomp�tence du gouvernement vont faire des �mules. La direction de Langevin est d�pass�e. Aux parents qui t�l�phonent pour conna�tre la situation du lyc�e on r�pond que l’accueil des �l�ves a bien lieu. Pourtant la r�alit� est autre : barricades devant l’entr�e, aucun enseignement.

29 mars. Un vote est organis� par l’administration qui conteste la l�gitimit� du blocage (impos� par une minorit� hurlante qui emp�che la majorit� silencieuse de travailler comme elle le d�sire). Les �l�ves se prononcent � 70% pour le maintien des grilles et cadenas (participation : environ 50%). Depuis Paris, le ministre de l’Education nationale Gilles de Robien donne la consigne aux recteurs de faire d�bloquer les lyc�es au plus tard le lendemain matin. Le Pr�fet prend les choses en main, toute demande d’intervention de la force publique doit passer par son cabinet. Probl�me : les effectifs policiers restent insuffisants pour satisfaire � la directive gouvernementale. Les parents d’�l�ves anti-blocage sont d�pit�s car le repr�sentant de l’Etat a ordonn� � ses troupes de ne rien faire sauf en cas de trouble � l’ordre public. Les esprits s’�chauffent, voil� plus de deux semaines que les classes sont d�sert�es.

Vendredi 31 � 20 heures, la France interloqu�e d�couvre qu’un Pr�sident audacieux peut promulguer une loi en demandant toutefois de ne pas l’appliquer.

Lundi 3 avril, retour � Langevin. Les "anti-blocage" tentent un passage en force, trois ou quatre cours d�butent malgr� la franche paga�e dans le hall — des �l�ves et des professeurs de tout bord dissertant de vive voix sur la d�mocratie ou le droit constitutionnel. L’administration prend l’initiative de fermer le lyc�e sans pour autant renvoyer les minots d�j� install�s. Nous voil� pass�s du "lyc�e ouvert qui n’accueille aucun �l�ve" au "lyc�e ferm� qui accueille des �l�ves".

Deux jours plus tard se tient enfin un Conseil d’administration extraordinaire, plus d’une semaine apr�s que certains membres en ont fait la demande. Un seul point � l’ordre du jour : « questions urgentes soulev�es par la situation actuelle du lyc�e (gr�ves) ». Mais le d�bat tarde � s’installer. Le chef d’�tablissement �mile Grosso temporise. Les forces de l’ordre qui stationnent devant le lyc�e demandent sa pr�sence, il envoie la proviseure adjointe. Apr�s de nouvelles tergiversations, il d�clare avoir pris seul l’initiative de contacter la police pour r�tablir l’acc�s. Mis devant le fait accompli, l’ensemble du CA quitte la salle en criant � la mascarade. Flottement. Les forces de l’ordre n’interviennent pas. Apr�s une reprise du CA, Grosso d�cr�te la fermeture de l’�tablissement pour la journ�e du jeudi 6 avril et l’organisation d’un nouveau scrutin le vendredi 7.

Le d�put� entre dans la danse

Le jour du vote, deux invit�s surprise ont fait le d�placement : le d�put�-maire de Six-Fours Jean-S�bastien Vialatte ainsi qu’un conseiller municipal FN de la m�me commune, Thierry Senelle [1]. Des tracts anonymes (beau papier � fort grammage) appelant � la reprise des cours sont distribu�s avec la b�n�diction de Grosso :

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Une pens�e �mue pour tous les �l�ves orphelins en difficult� qui ne pourront d�sormais plus jamais signer un contrat premi�re embauche.

Jean-S�bastien quitte les lieux vers 11 heures en promettant l’ouverture de l’�tablissement d�s lundi parce qu’il y veillera personnellement avec 300 parents de la PEEP [2]. Manque de bol, les lyc�ens viennent � nouveau de se prononcer � 55% pour la poursuite du blocage (participation : 40%). L’administration envoie deux messages SMS aux familles des �l�ves. Si le premier donne les r�sultats du vote, le second annonce que le lyc�e est d�bloqu�. Apr�s "le lyc�e ouvert qui n’accueille aucun �l�ve", apr�s "le lyc�e ferm� qui accueille des �l�ves", voici donc "le lyc�e bloqu�-ouvert". La situation �volue.

Lundi matin (10 avril), Vialatte est pr�sent devant l’�tablissement. Les "parents d’�l�ves" de la PEEP qui l’accompagnent semblent tous �tre titulaires de l’�quipe de rugby de Six-Fours. Etrange. Ce n’est donc pas la police qui va assurer le libre acc�s au lyc�e Langevin, mais un d�put� de la R�publique venu faire le coup de poing. C’est sans doute ce qu’on appelle aller au contact de la population, Jean-S�b adore �a. Il va m�me s’�gratigner le visage en essayant d’emp�cher les enfants d’�tablir leur barricade. C’est la premi�re fois en trois semaines de conflit que le sang coule. Mais il a r�ussi une perc�e, quelques cours �pars auront lieu. Une r�union administration-parents est improvis�e, Vialatte se tient � c�t� du proviseur. Il s’�clipsera en pr�textant un appel t�l�phonique apr�s qu’un parent aura contest� la pertinence de sa pr�sence.

En milieu de matin�e le CPE est retir�.
Tous les cours reprendront normalement � partir de mardi.

Service d’int�r�t g�n�ral

Comment Jean-S�b en est-il arriv� l� ? Trois semaines d’entrevues avec des parents d’�l�ves offusqu�s de l’atteinte faite � la libert� d’apprendre, trois semaines sans que les k�pis annonc�s n’interviennent, trois semaines pour voir l’UMP capituler devant les forces du d�clin l’auront sans doute rendu irritable. On a beau �tre d�put�, on n’en reste pas moins homme. Question : pourquoi concentrer son attention sur Langevin alors que la circonscription compte d’autres �tablissements, le lyc�e Beaussier par exemple o� les bloqueurs �taient tout aussi actifs ?

Il existe une association nomm�e l’IFAPE, aux multiples labels [3], dont l’action s’inscrit dans ce qu’il est convenu d’appeler "la formation tout au long de la vie". Logiciels ludo-�ducatifs, autoformation accompagn�e, capacit�s d’autonomie, outils multim�dia, la fameuse innovation p�dagogique centr�e sur l’outil informatique. Plus exactement : l’outil informatique comme fantasme de l’innovation p�dagogique. Sur le forum de l’IFAPE on peut d’ailleurs relever quelques th�mes de discussion qui passionneront surtout ceux qui n’ont jamais taquin� le mulot : utilisez-vous la messagerie instantan�e ? Faites-vous confiance aux informations qui circulent sur le net ? Quels sont les moyens les plus efficaces pour rechercher de l’information ? Avez-vous d�j� achet� sur le net ? Le t�l�chargement, c’est l�gal ou ill�gal ? Payez-vous vos imp�ts en ligne ? Vaste programme de formation. On notera que les participations aux discussions sont — �videmment — rares.
Cette association b�n�ficie d’un budget annuel de pr�s de 1,4 million d’euros : subventions de l’Europe, l’�tat, la R�gion, le D�partement, TPM, des communes et de la caisse des d�p�ts et consignations [4].
Jean-S�bastien Vialatte en fut le pr�sident pendant 10 ans. Il a laiss� sa place le 9 mars dernier � un certain... �mile Grosso, proviseur du lyc�e Langevin et par la m�me d�j� responsable d’une formation technique, et g�n�rale, et professionnelle, d’un GRETA, d’un CFA et d’une MGI [5]. Quand on aime on ne compte pas. Proviseur Grosso a m�me re�u les insignes de commandeur de l’ordre national des Palmes Acad�miques des mains du pr�sident UMP du Conseil g�n�ral du Var, en pleine crise, le 6 avril � Gonfaron [6].

Deux jours apr�s la reprise des cours, le site de l’IFAPE informe l’usager de la mise en place d’un nouveau service baptis� "SOS cours".

Un euro de l’heure ! Comme les enseignements par visoconf�rence ne sont pas assur�s depuis P�kin mais Six-Fours, on doit en d�duire qu’ils sont largement subventionn�s, c’est-�-dire financ�s par le contribuable. L’IFAPE dispose de six lieux d’accueil (ou "cyber-bases") : un sur La Seyne, Ollioules, Le Beausset et La Garde, deux � Six-Fours, municipalit� de Vialatte. Les cours � un euro ne sont pourtant propos�s qu’� Six-Fours, Le Beausset et Ollioules (et � partir du 24 avril, La Seyne). Certains esprits chafouins diront que les �l�ves de La Garde sont bien trop �loign�s de la circonscription de Vialatte (toujours vice-pr�sident de l’IFAPE) pour �tre les enfants d’�lecteurs potentiels. Notons aussi que les "rattrapages" ne concernent que les fili�res g�n�rales et technologiques [7]. Ceux qui suivent un cursus au lyc�e professionnel peuvent donc se gratter. Comme disait le tract � fort grammage, « les plus en difficult� d’entre vous ne pourront jamais rattraper les retards accumul�s ». Il faut reconna�tre que d�monter un moteur ou cheviller un meuble par visioconf�rence, c’est un peu d�licat.
Quant au coeur de cible, les quelques milliers de gamins susceptibles d’�tre int�ress�s... Ils disposent d’une dizaine de postes informatiques sur chacune des "cyber-bases" pour suivre les cours par webcam interpos�e...
Bah ! Si l’usage que certains font des nouvelles technologies tient plus de la bouffonnerie et du vent que de la p�dagogie et du soutien scolaire, l’IFAPE permet � �mile Grosso et Jean-S�bastien Vialatte d’occuper leurs loisirs et les pages de Var matin. C’est d�j� �a.

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[1] Pr�sent sous l’�tiquette parent d’�l�ve PEEP.

[2] F�d�ration de parents d’�l�ves penchant � droite.

[3] ERIC, CYBER BASE et APP.

[4] Var matin, �dition du 11 mars 2006.

[5] GRETA : formation continue pour adulte, CFA : centre de formation des apprentis, MGI : mission g�n�rale d’insertion.

[6] Remarque culturelle qui n’a rien � voir : Gonfaron est r�put� pour �tre le pays des �nes qui volent.

[7] Cours de rattrapage pour les jeunes, Var matin, �dition du 21 avril 2006.

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