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LETTRE D'INFORMATION |

Les courages de la Croix-Rouge

lundi 23 janvier 2006
Dans un entretien publi� par Var matin le 12 janvier dernier, la vice-pr�sidente honoraire de la Croix-Rouge fran�aise et actuelle pr�sidente de la d�l�gation du Var, Simone Long, saluait le d�sengagement « courageux » de la Croix-Rouge en Seine-Saint-Denis.
Un m�decin du centre m�dico-social de Blanc-Mesnil commente les propos de la pr�sidente dans une lettre initialement adress�e au journaliste qui tenait le micro le jour de l’interview.

NOUS reproduisons ci-dessous les questions/r�ponses de Var matin, puis la lettre du docteur Jean-Jacques Hardy.


Var matin : la Croix-Rouge se d�sengage-t-elle des zones les plus d�favoris�es ?
Simone Long : pas du tout ! Cette annonce de fermeture est une d�cision courageuse. Des centres de soins municipaux existent � proximit� imm�diate alors nous ne sommes plus indispensables. Pendant longtemps, les f�d�rations d�partementales se sont elles-m�mes priv�es pour renflouer les caisses des centres de sant� de la couronne parisienne. L’ann�e derni�re, la Croix-Rouge du Var a d� renoncer � plus d’un million d’euros !
Pourquoi ne pas utiliser une partie des 110 millions d’euros recueillis pour les sinistr�s du tsunami pour aider les centres ?
Surtout pas ! Cette somme a �t� affect�e pour le tsunami et par respect pour les donateurs et les victimes, elle doit le rester.
La Croix-Rouge est-elle particuli�rement pr�sente dans le Var ?
Nous en parlons assez peu mais la Croix-Rouge met � disposition des Varois des instituts de qualit� et emploie 400 personnes. A l’image du centre de radioth�rapie � Toulon qui accueille 220 personnes atteintes de cancer chaque jour. C’est la grande fiert� de la Croix-Rouge varoise. Il y a aussi, entre autres, des centres de formation de secouristes ou aux m�tiers m�dico-sociaux, un foyer de vie pour handicap�s mentaux adultes � Fr�jus, le centre d’h�bergement pour SDF � Draguignan et son SAMU social qui fonctionne tout l’hiver.
Des projets pour 2006 ?
Nous allons agrandir l’institut m�dico-�ducatif de la Seyne, destin�s aux ados souffrant de d�ficience intellectuelle. Nous voulons cr�er une maison de jour pour les malades d’Alzheimer, qui permettrait de soulager les familles mais il nous faut un terrain proche d’un h�pital. J’aimerais aussi ouvrir une session de formation des gestes qui sauvent pour les jeunes mamans du golfe de Saint-Tropez...

*

Toulonnais expatri� dans les banlieues de Paris et n�anmoins amoureux inconditionnel de Toulon et de sa r�gion, je suis amen� � lire Var matin r�guli�rement.
En tant que repr�sentant des m�decins au comit� d’entreprise du plus gros des centres de sant� appel�s � dispara�tre par une d�cision du bureau de la Croix-Rouge Fran�aise, je suis extr�mement choqu� — comme mes confr�res — des propos tenus dans vos colonnes du 12 Janvier 2006 par la pr�sidente de la Croix-Rouge du Var, vice-pr�sidente honoraire de la Croix-Rouge Fran�aise.
J’ai confiance en la sagacit� des lecteurs pour appr�cier le « courage » qu’il y aurait � refuser le combat contre la pr�carit� sociale et sanitaire, dans une zone g�ographique parmi les plus d�sert�es par les pouvoirs publics et les m�decins.
Le dispensaire de Blanc-Mesnil est situ� sur un territoire comportant 3 fois moins de m�decins que la moyenne d’�le-de-France. La disparition du Centre M�dico-Social implique le retrait de 19 m�decins sur les 24 existants dans la zone nord de la ville, tr�s isol�e et tr�s loin du dispensaire municipal que madame Simone Long situe pourtant � « proximit� imm�diate » de notre �tablissement. Je rappelle que la population concern�e (25.000 habitants) pr�sente le niveau de sant� le plus bas d’�le-de-France, et qu’il n’y a plus la possibilit� d’obtenir une proth�se dentaire dans la ville quand on b�n�ficie de la C.M.U. ou de l’A.M.E [1].
Du courage et des ressources morales, il en faut � ces ch�meurs pour trouver du travail en se pr�sentant avec un �tat dentaire r�put� le pire d’�le de France et ce n’est pas la pr�sidente de la Croix-Rouge du Var qui va leur en donner, on l’a bien compris. Sur le taux de morbidit� ou de mortalit�, nous atteignons des chiffres impensables � notre �poque et dans notre pays, comme l’indiquent les rapports de Sant� publique publi�s r�cemment par nos institutions.
Les m�decins des centres m�dico-sociaux sont depuis plus de trente ans les derniers remparts contre la dynamique de pr�carisation dans le 93 ; leur retrait sur ordre de d�cideurs qui ne sont jamais venus mesurer sur place l’exceptionnelle gravit� de leurs arbitrages �meut particuli�rement l’ensemble des populations et les m�decins. Ceux-ci repr�sentent souvent, au quotidien, le seul espoir d’�chapper au sentiment d’abandon, de retrouver une dignit� et la sant� permettant d’avoir acc�s � un travail. Il n’y avait que le personnel et les m�decins de ces dispensaires et en particulier du Blanc-Mesnil pour �lever le niveau de sant�, r�tablir et entretenir le lien social, aider � la parentalit�. Les �v�nements de novembre montrent � quel point ce besoin est important. Nous savons l’int�r�t et la n�cessit� de p�renniser les structures qui peuvent rendre ces services dans un m�me lieu � proximit� des personnes d�munies. Les aides partielles et diss�min�es, mises en avant par Madame Simone Long ne peuvent remplir ces fonctions de prise en charge globale indispensables aux personnes r�put�es les plus pr�caires. On est loin des pr�occupations pour les jeunes mamans du Golfe de Saint-Tropez qui, si elles sont honorables, n’emp�cheront pas le feu et le sang dans les cit�s de Toulon ou d’ailleurs. Les O.N.G �taient l� ou l’Etat ne savait, ne pouvait ou ne voulait pas faire, c’�tait l’honneur des m�decins et des personnels de la Croix-Rouge d’�tre pr�sents sur le champ de bataille contre la pr�carit�. J’ai honte qu’une Toulonnaise batte en retraite comme "Peuch�re les brailles � la main". Qui peut croire maintenant que « la pr�sidente de la Croix-Rouge du Var emm�ne son association sur tous les fronts » quand elle ne se pr�occupe pas des plus pauvres parmi les pauvres, fussent-ils en banlieue parisienne o� ils ont cru au mirage des grandes villes et des aides de l’Etat ? J’y ai rencontr� des Toulonnais et d’autres de toutes r�gions malades et affam�s, en d�sh�rence faute de soins et de prise en charge globale.
Aider � la lutte contre le cancer par la radioth�rapie c’est bien, emp�cher qu’une population se pr�vale du plus fort taux de cancers induits par des conditions de vie d�plorables est un combat tout aussi louable m�ritant bien le sacrifice d’un million d’Euros — qui vient de la solidarit� des Toulonnais envers les plus d�munis et non de la poche de Madame Simone Long, o� la place devrait suffire pour qu’elle puisse y remettre sa langue. La pr�sidente vient de perdre l’occasion de travailler dans le silence et le d�vouement comme il se doit dans une entreprise charitable et comme l’ont fait jusque l� les m�decins de ces dispensaires du 93, qui consid�rent les d�cisions de la Croix-Rouge comme moralement insoutenables. Mais tout n’est pas perdu heureusement... Il reste 2 mois aux d�cideurs et aux acteurs m�dico-sociaux pour redonner � la Croix-Rouge l’image qu’elle n’aurait jamais du perdre aux yeux des Fran�ais et des Varois en particulier.

Docteur Jean-Jacques Hardy, repr�sentant des m�decins du centre m�dico-social de Blanc-Mesnil au comit� d’entreprise.

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Les centres ferm�s en d�cembre dernier ont rouvert leurs portes le 13 janvier (le lendemain de la publication des propos de Simone Long) sous la pression populaire, celles des personnels et des �lus. A peu pr�s trois mois de sursis jusqu’au 9 mars prochain, date � laquelle le comit� central d’entreprise devra rendre un avis sur le projet de restructuration de la Croix-Rouge. Lire cet article de l’Huma.

Sur les vases non communicants du tsunami, le Canard encha�n� du 18 janvier 2006 fait quelques remarques int�ressantes : « rien n’emp�che la Croix-Rouge de demander aux donateurs l’autorisation d’employer une partie de l’argent pour d’autres actions, comme l’a fait notamment M�decins sans fronti�res. D’autant que la majeure partie des fonds du tsunami n’a pas encore �t� d�pens�e. 27 millions se trouvent m�me sans projet d’affectation ». Et d’ajouter : « tsunami ou pas, la Croix-Rouge se porte plut�t bien. L’ensemble de ses �tablissements a m�me affich� un b�n�fice de 3,2 millions en 2004 ».

[1] CMU : Couverture Maladie Universelle. AME : Aide M�dicale d’Etat.

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