C’est un de ces petits matins gris et pluvieux, avec comme un go�t fadasse de chicor�e soluble. Ti�de. Un de ces petits matins o�, tout tranquillement, le monsieur de la radio donne les nouvelles, puis annonce le rapport Camdessus, comme �a, l’air de rien. Vous n’�tes m�me pas encore au boulot qu’on vous dit que vous irez bosser jusqu’apr�s votre retraite. Une retraite qui sera de toute fa�on symbolique. On vous annonce qu’ils veulent supprimer le CDI. Que la r�gle sera la pr�carit� : il vous sera d�sormais impossible de faire des projets d’avenir. Terroris� � l’id�e de perdre votre emploi, et de devoir accepter n’importe quel job pourri � l’autre bout de la France, vous serez toujours sur le qui-vive, toujours tendu, jamais tranquille : vous aurez une vie de merde. En plus, il a plu dans la nuit, et le linge qui s�chait est tremp�. C’est un de ces petits matins o� on vous dit que, vous jeune, vous vieux, ne bossez pas assez. Et pour trop cher, de toute fa�on. On vous dit qu’on va bloquer le SMIC. Et que vous ne serez probablement jamais fonctionnaire, parce qu’on va en supprimer un maximum de postes. Un de ces petits matins o� on vous dit que les ch�meurs seront fliqu�s plus que jamais. Un petit matin tr�s gris o� le droit au travail se transforme violemment en devoir.

Mais qui dit �a ?

C’est M. Camdessus. L’ancien patron du FMI. Celui qui a donn� la m�me recette de la modernit� � tous les pays pauvres que le FMI devait aider. Une recette qui les a totalement ruin�s. Parce que cette recette vise � d�truire tout ce � quoi sert un Etat : mutualiser les risques. Maintenant que les pays pauvres gonflent les rangs des « pays les moins avanc�s », qu’il n’y a plus rien � privatiser l�-bas, il vient nous donner cette m�me recette aux pays riches : d�truisez toutes les protections !! du Travail, de la Sant�, de la Retraite !! Tout !! Pr�carisez tout et tous !! R�duisez l’Etat, LIBEREZ LES FORCES DU MARCHE !! Et il le dit avec la violence du bureaucrate d�connect� du monde r�el qui ne comprend pas vraiment les cons�quences des mots qu’il dit.

Et qui, en ce petit matin morne, qui va gueuler contre ces conneries ?

Personne. Personne parce que c’est un de ces petits matins tr�s tr�s gris o� la « g�che parlementaire » reste muette, absente, inexistante. La « m�me n�ant » de la politique. Elle est bien trop occup�e � se chamailler pour des �lections qui auront lieu dans trois ans. Et puis de toute mani�re, �a l’arrange bien d’avoir des fous furieux � sa droite : �a permet de faire pareil en plus mou, sans en avoir trop l’air.

C’est un de ces petits tr�s gris qui font tr�s peur.

Alors pour pas c�der � la panique, apr�s la « Journ�e Mondiale du refus de la pauvret� », on d�cr�te 364 journ�es mondiales du refus de la richesse. On refuse de se faire squatter la parole, on crie. On refuse de se faire emp�cher de bouger, on manifeste. On refuse de se faire r�genter la pens�e. On cr�e.

Jocrisse