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Elitisme et rugby : des solutions � l’aile

Les pros et les anti (2/2)
mardi 8 novembre 2005
par Saint-Just

Tandis que les Toulonnais se rongent les ongles au gr� des prestations de leur �quipe fanion, le gotha du rugby s’interroge. Ainsi que Cuverville, dans ses salons feutr�s.

LA formule du Top 14, avec son �litisme � tout crin et la rel�gation directe des deux derni�res �quipes, s�duit apparemment toujours autant les instances dirigeantes. Le pr�sident de Bourgoin-Jallieu affirme que le Top 14 « est une formule qui convient parfaitement au rugby fran�ais » [1]. Les observateurs sont pourtant moins assur�s qu’en fin de saison 2004-2005.

Extinction du domaine de la lutte

Certains responsables du rugby fran�ais cherchent des solutions aux probl�mes relatifs au recrutement des joueurs. Le complexe du plombier polonais a fait son apparition dans le d�bat rugbystique sous la forme, pourrait-on dire, du pilier droit sud-africain ou de l’ailier argentin. Si l’on prend le cas du Rugby Club Toulonnais, c’est un v�ritable contingent sud-af’ qui a jet� les amarres dans la rade [2]. Pourtant, ce ne sont pas les jeunes du centre de formation qui manquent.
En fait, la formule actuelle de championnat ne permet pas aux "minots" de s’aguerrir, si bien que lorsqu’on propulse Lancelle sous les feux de la rampe, il se voit aussit�t grill�. Tous les matchs sont des matchs � enjeu. M�me les anciens sont sous pression. Poitrenaud garde sa place de titulaire dans l’effectif du Stade Toulousain alors qu’il a fait perdre une finale suite � un bref instant d’h�sitation. A Toulon, la peur de la r�trogradation jette aux chiens un Comba qui par un coup de pied maladroit fait perdre le RCT face � son rival direct, Pau.
Pour limiter le nombre de joueurs �trangers dans le championnat fran�ais, et donc �largir la palette de talents disponibles pour le XV de France, le s�lectionneur fran�ais Bernard Laporte propose d’imposer un nombre de joueurs s�lectionnables par �quipe. Serge Blanco opterait plut�t pour un quota de joueurs issus des centres de formation. Sauf que la formule "Top 14" vide de sa substance le principe m�me des centres de formation. En effet, quel est l’int�r�t pour un club qui souhaite acc�der au haut niveau de perdre son temps et son argent dans la formation de joueurs qui feront banquette ou partiront chez les rivaux voir si l’herbe est plus verte ? Autant laisser cette "charge" � des clubs de division inf�rieure comme Tyrosse, voire Bobigny ou Massy, ou � l’oppos�, aux clubs stabilis�s tout en haut de la pyramide.
D�s lors, le club ne peut plus r�pondre � l’envie de maillot du jeune passionn�... qu’en le lui vendant. Ce maillot officiel qu’on ach�te pour l’exhiber dans la rue, celui dont l’�quipementier d�cline divers mod�les afin d’optimiser les marges. Et en plus, on flatte la sensibilit� chauvine. « Fiers d’�tre toulonnais » comme d’autres sont fiers d’�tre de la Mitre, de Saint-Jean, du Pont-du-Las, de mon immeuble, de mon �tage, de ma chambre, etc. En outre, il sera plus facile pour le gamin de porter le brin de muguet sur le coeur : un passage � la boutique �vite bien des coups de crampons dans des m�l�es ferm�es.

Le cas des clubs qui naviguent entre les deux plus hautes divisions du rugby fran�ais (pour des raisons sportives, faut-il le pr�ciser ?) pose un vrai probl�me. Ces clubs ont beau vouloir se structurer financi�rement, leur situation reste toujours bancale. ProD2 est synonyme de moindre exposition m�diatique. Ceci entra�ne un cercle vicieux. Les joueurs de niveau Top 14 quittent le club pour aller jouer dans l’�lite, quitte � se retrouver en deuxi�me ou troisi�me banc. Ils pourront toujours faire leurs preuves au cours de la saison et auront de toute fa�on plus de chance d’�tre s�lectionn�s en �quipe nationale. Les sponsors ont eux aussi tendance � fuir, ou en tout cas moins investir, ce qui peut mettre le club en difficult� financi�re. Les dirigeants peuvent toujours esp�rer un retour dans l’�lite, mais �a tient de l’improbable ou de l’acharnement [3].

Des solutions � l’aile

Comment inverser la tendance ? A l’�poque de l’amateurisme, le beau Daniel Herrero s’exprimait ainsi : « moi, je suis pour r��quilibrer le championnat ; car, effectivement, il n’est pas correct pour l’�thique sportive qu’Agen plante cent points � z�ro � Trifouillis-les-Oies. Le sport se doit d’�tre moral. Que les petits luttent avec les petits. Ok, si tu veux �tre moyen faut bosser, et encore plus si tu veux �tre super bon ! Tu t’arsouilles, tu transpires, tu r�fl�chis, tu prends des coups de tronche dans les reins... Il faudrait une r�organisation d�cente du championnat mais en �vitant l’�cueil de l’�litisme � tout crin. On n’a pas d’exemple d’�lite non pervertie par le bl�. Il faut des poules mieux r�parties ». Nous sommes aujourd’hui tomb�s dans « l’�litisme � tout crin », un �litisme de gonflette qui cache sa mis�re pour quelques temps encore. L’id�e des poules serait pourtant int�ressante dans l’optique de mieux r�partir les forces sans perdre en lisibilit�.
Deux poules de 12 clubs (par exemple) poursuivraient s�par�ment leur championnat. A l’issue de la saison, des phases finales seraient propos�es aux deux fois deux premiers : le premier de la poule A affronterait le second de la poule B, et le premier de la poule B le second de la poule A. Et le dernier de chaque poule serait rel�gu� en division inf�rieure. La saison suivante, les quatre demi-finalistes et les deux promus seraient r�partis de fa�on �quitable (un finaliste, un demi-finaliste, un promu par poule). Le ventre mou se verrait dispatch� par tirage au sort. In fine, les clubs de l’�lite ne joueraient pas plus de matchs qu’avec le syst�me du Top 14. Cette formule permettrait une stabilisation des clubs.
Les propositions de Blanco sur l’obligation d’int�grer un pourcentage de joueurs issus du centre de formation seraient dans cette formule de championnat plus pertinentes. Les "espoirs" auraient le temps de s’�panouir progressivement sans se br�ler les ailes. Les joueurs �trangers se verraient moins affubler du qualificatif de "mercenaires".
A cela devrait s’ajouter une taxation des salaires par cat�gories de joueurs, c’est-�-dire une �chelle des r�mun�rations (hors contrats d’image et �quipementiers) qui s’appliquerait � tous les clubs. Ainsi un international co�terait, � quelques euros pr�s, la m�me somme � Toulouse, � Clermont et � Toulon. Idem pour un joueur confirm�, ou tout juste sorti du centre de formation, etc. Une limitation souple de la masse salariale pourrait �galement resserrer les �carts trop importants entre les clubs. Certes une "entreprise" comme le Stade Toulousain qui aujourd’hui est r�compens�e par des ann�es de bonne gestion pourrait se sentir flou�e, mais une mise en place progressive du syst�me ne la g�nerait aucunement. Le rugby fran�ais �viterait une flamb�e des prix telle celle qu’a connu Biarritz en surench�rissant sur Betsen mais en oubliant de financer ses activit�s "amateur". Les clubs de cette �lite �largie gagneraient � exprimer leur diversit� en sachant qu’une certaine stabilit� leur permet de travailler sur la dur�e. Cette "salary cap" ne pourrait fonctionner (elle finirait m�me par confisquer les fruits du travail des joueurs pour les redistribuer aux dirigeants et aux financiers) si elle n’�tait li�e � une redistribution �galitaire des revenus d’un championnat. Facilit�s �conomiques pour les clubs rel�gu�s, et surtout, participation du rugby professionnel au financement du rugby amateur. Les dirigeants de clubs qui reprennent � leur compte la maxime de Malthus selon laquelle « il n’est pas au pouvoir des riches de fournir aux pauvres de l’occupation et du pain, et en cons�quences les pauvres, par la nature m�me des choses, n’ont rien � leur demander » devront s’adapter.
Tout comme La t�l�vision, � l’inverse de ce qui se passe actuellement. Canal+ diffuse la comp�tition pour un montant de 20 millions annuels, ce qui a augment� le budget des clubs de 15% pour le Top 14 et de 10% pour la ProD2, la somme atteint aujourd’hui 115 millions d’euros. B.Laporte, pourtant disciple sarkozien, avertissait son monde voil� d�j� cinq ans : « attention � ne pas mettre trop de rugby � la t�l�vision. D’autres sports comme le basket ont eu de bien mauvaises surprises en jouant la surexposition » [4]. Paradoxalement, selon lui, le probl�me ne vient pas tellement de la t�l�vision mais plut�t du fait que « le rugby ne couvre pas l’ensemble du territoire ». A chacun ses contradictions.

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[1] Midi Olympique, le 3 octobre 2005. Ce num�ro contient un dossier tr�s int�ressant sur les probl�mes du rugby fran�ais actuel.

[2] QDLR : sont-ils pay�s selon les conventions collectives sud-africaines ?

[3] C’est le cas avec B�ziers, dont l’entra�neur Olivier Saisset ironisait sur le RCT mais qui d�couvre l’univers moins glorieux de la descente.

[4] En attendant le foot.

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  • �litisme 7 janvier 2006, par


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