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LETTRE D'INFORMATION |

Europe et services publics : d�finitions

lundi 4 avril 2005
par Emanuel Haumant
« Service public � la Fran�aise » : expression utilis�e par les tenants de l’id�ologie dominante pour dynamiter le concept de service public tout court, en pr�tendant qu’il n’aurait pas le m�me sens pour tout le monde. Cela passe par l’�laboration de nouvelles d�finitions.

REMARQUE liminaire : la bande-son de cet article, que vous pourrez r��couter � volont� en cliquant sur le bouton tout en bas, est extraite d’un entretien accord� par Renaud Dutreil, Ministre de la Fonction publique et de la R�forme de l’Etat, � la r�daction du 7/9 de France inter le mardi 29 mars 2005.

Avant de s’int�resser aux d�finitions des services d’int�r�t g�n�ral propos�es par les  [1] de la Commission europ�enne, ouvrons le Littr�, ce dictionnaire surann� de la fin du dix-neuvi�me si�cle.

Public : qui appartient � tout un peuple, qui concerne tout un peuple.
Services publics : les diverses branches de l’administration des affaires de l’�tat.
Fonctionnaire public : celui qui exerce quelque charge ou fonction d�l�gu�e par la soci�t�.

Paul Emile Littr� n’�tant plus parmi nous pour actualiser son dictionnaire, c’est donc la Commission qui s’en charge.

« D�finitions terminologiques ».

« Des diff�rences terminologiques, une confusion s�mantique et des traditions vari�es dans les �tats membres ont cr�� de nombreux malentendus dans le d�bat men� au niveau europ�en [...] L’expression services d’int�r�t g�n�ral ne se trouve pas dans le trait� lui-m�me. Elle d�coule dans la pratique communautaire de l’expression service d’int�r�t �conomique g�n�ral qui est, elle, utilis�e dans le trait� [...] L’expression services d’int�r�t �conomique g�n�ral est utilis�e aux articles 16 et 86, paragraphe 2, du trait� [2]. Elle n’est pas d�finie dans le trait� ou dans le droit d�riv� [...] Il convient de souligner que les termes service d’int�r�t g�n�ral et service d’int�r�t �conomique g�n�ral ne doivent pas �tre confondus avec l’expression service public, qui est moins pr�cise  » (livre blanc, annexe 1).
La notion de service public serait moins pr�cise que celle de service d’int�r�t �conomique g�n�ral ? Petit retour en arri�re.

Services publics : un peu d’histoire.

Que ce soit au niveau fran�ais ou europ�en, ces notions se sont construites de mani�re jurisprudentielle au gr� des arr�ts du Conseil d’�tat et de la Cour de Justice des Communaut�s Europ�ennes.
En France, la th�orie �labor�e par L�on Duguit s’impose comme r�f�rence : « [Rel�ve du service public] toute activit� dont l’accomplissement doit �tre assur�, r�gl� et contr�l� par les gouvernants, parce que l’accomplissement de cette activit� est indispensable � la r�alisation et au d�veloppement de l’interd�pendance sociale, et qu’elle est de telle nature qu’elle ne peut �tre r�alis�e compl�tement que par l’intervention de la force gouvernante » [3]. Selon Fran�ois L�v�que [4], toute la jurisprudence du Conseil d’Etat a �t� b�tie sur cette notion d’�tat R�publicain de service public, dispensant le l�gislateur d’une d�finition rigoureuse du concept. Toujours selon le m�me auteur, un service public doit r�pondre � un besoin d’int�r�t g�n�ral, notion qui n’est pas d�finie par le droit public et qui a vari� suivant les �poques. Limit�e pendant la p�riode lib�rale de l’entre-deux guerres aux fonctions r�galiennes de l’�tat, elle a �t� �largie � un grand nombre de services apr�s la Lib�ration. L’impr�cision juridique relative � la notion d’int�r�t g�n�ral permet une adaptation facile du droit, mais pr�sente l’inconv�nient de voir l’�tat se l�gitimer par ses activit�s de services publics dont lui seul d�termine le champ d’application. Notons que dans l’Hexagone, les principes de gestion r�gissant les services publics sont ceux d’�galit�, de continuit� et d’adaptation aux changements [5].
En Europe, la r�f�rence est plut�t � chercher du c�t� de Friedrich von Hayek, le th�oricien des politiques men�es par Reagan et Thatcher. L’angle d’attaque pour d�finir l’int�r�t g�n�ral n’est plus juridique mais �conomique. C’est l’article 90 �2 du trait� de Rome qui introduit la notion de service d’int�r�t �conomique g�n�ral [6] : « les entreprises charg�es de la gestion de services d’int�r�t �conomique g�n�ral [...] sont soumises [...] aux r�gles de la concurrence, dans les limites o� l’application de ces r�gles ne fait pas �chec � l’accomplissement [...] de la mission particuli�re qui leur a �t� impartie ». Le cadre des services d’int�r�t �conomique �volue au gr� de d�cisions de la Commission et de la Cour de Justice Europ�enne, de nouveaux secteurs �tant r�guli�rement choisis pour �tre soumis � la concurrence. C’est ainsi que le service d’int�r�t g�n�ral se retrouve intimement li� au droit de la concurrence, droit o� la raison �conomique est la plus forte [7].

Le trait� constitutionnel europ�en ambitionne donc d’ouvrir progressivement � la concurrence des secteurs d’activit� qui relevaient de l’Etat.

La r�daction des livres vert et blanc s’inscrit dans ce cadre. On remplace les principes d’�galit�, de continuit� et d’adaptation aux changement par 5 autres propositions : « service universel, continuit�, qualit� du service, accessibilit� tarifaire, protection des utilisateurs et des consommateurs » (livre vert) [8]. Pour d�chiffrer les orientations globales il est encore n�cessaire de s’attarder sur le vocabulaire : « le service universel est une notion cl� que la Communaut� a d�velopp�e pour assurer l’accessibilit� effective des services essentiels » (livre blanc page 8).
L’expression service universel est apparue pour la premi�re fois dans un autre livre vert relatif au secteur des t�l�communications (1987), elle est emprunt�e au droit am�ricain - apparemment plus adapt� aux objectifs de la Commission que celui des �tats membres. La notion implique tous les services de base dont l’accessibilit� est jug�e indispensable pour l’ensemble des citoyens. Le service universel n’est pas cit� dans les trait�s et n’est pas d�fini en droit, cette expression ne fait m�me pas partie du lexique du livre blanc. Pr�cisons : « si les �tats membres constatent que les m�canismes du march� seuls ne suffisent pas pour assurer la fourniture d’un service universel, ils doivent intervenir pour assurer sa fourniture » (livre vert page 38). Autrement dit, l’Etat r�cup�re le financement de tout ce que le March� ne trouve pas rentable.

Et la France dans tout �a ?

« La doctrine r�publicaine et la conception unitaire du service public ont �t� r�affirm�es dans un rapport du Conseil d’Etat de 1994. Ce rapport, dit rapport Belorgey, est construit autour de deux propositions. La premi�re tient que le service public proc�de de l’intervention de la force gouvernante, qu’il renvoie � la notion de souverainet�. La seconde, que le service public est un �l�ment fondateur du pacte R�publicain, au m�me titre que la d�mocratie repr�sentative, qu’il renvoie � la notion de citoyennet�. Pour le Conseil d’Etat, il n’y a pas de diff�rence de nature entre services publics r�galiens, sociaux, industriels et commerciaux. Ils rel�vent tous du m�me type d’analyse.
Cette doctrine r�publicaine s’est infl�chie r�cemment avec la publication du rapport Denoix de Saint Marc (1996) sur le
service public � la fran�aise. Le vice-pr�sident du Conseil d’Etat d�nonce l’amalgame entre secteur public et service public. Il sugg�re que le service public � caract�re industriel et commercial soit d�tach� de la notion de service public avec un grand P, qu’il renvoie � l’Histoire [9]. Il convient de la remplacer par celle de missions de services publics dont le contenu doit �tre d�fini au cas par cas selon les secteurs d’activit�s. Cet infl�chissement de la conception fran�aise tend ainsi, en ce qui concerne les services publics � caract�re industriel et commercial, � la rapprocher de la conception europ�enne » [4].

R��coutons maintenant Renaud Dutreil :


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Bibliographie :

- Commission europ�enne : (avec des liens vers les livres vert et blanc).
- Concepts �conomiques et conceptions juridiques de la notion de service public, L�v�que Fran�ois, "Concepts �conomiques et conceptions juridiques de la notion de service public", in Thierry Kirat et Evelyne Serverin, Dr., "Vers une �conomie de l’action juridique. Une perspective pluridisciplinaire sur les r�gles juridiques et l’action", Paris, CNRS Editions, 2000.
- La r�gulation des services publics (www.vie-publique.fr)
- Droit communautaire, service public et concurrence (Fondation Robert Schuman).
- Les grands principes du service public (Lois de Rolland).

[1] Les livres verts publi�s par la Commission europ�enne offrent un �ventail d’id�es dans le but de lancer, � l’�chelle europ�enne, une consultation et un d�bat. Les livres blancs contiennent un ensemble argument� de propositions d’action communautaire dans un domaine sp�cifique.

[2] Trait� de Rome (NDLR).

[3] Trait� de droit constitutionnel, 1928.

[4] Concepts �conomiques et conceptions juridiques de la notion de service public, in Thierry Kirat et Evelyne Serverin, Dr., "Vers une �conomie de l’action juridique. Une perspective pluridisciplinaire sur les r�gles juridiques et l’action", Paris, CNRS Editions, 2000.

[5] Lois de Rolland.

[6] Dans les trait�s europ�ens, la notion d’int�r�t g�n�ral n’appara�t que sous forme �conomique.

[7] L’ensemble de ce paragraphe reprend dans les grandes lignes le I de Fran�ois L�v�que, op.cit.

[8] Dans le livre blanc, le nombre de ces propositions a encore augment� (9) et le service universel a �t� avantageusement remplac� par une notion visant � assurer la coh�sion et l’acc�s universel : « permettre aux pouvoirs publics d’�tre proches des citoyens, atteindre des objectifs de service public au sein de march�s ouverts et concurrentiels, assurer la coh�sion et l’acc�s universel, maintenir un niveau �lev� de qualit� et de s�curit�, garantir les droits des consommateurs et des usagers, suivre et �valuer le fonctionnement des services, respecter la diversit� des services et des situations, accro�tre la transparence, assurer la s�curit� juridique ». Cela est somme toute beaucoup plus simple.

[9] On peut m�me se demander si ce rapport, command� pourtant pour �laborer la doctrine du service public � la fran�aise, n’organise pas son enterrement en abandonnant l’id�e d’une notion unitaire et abstraite du service public (note du document original).

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  • > Bolkestein, notre ami 6 avril 2005, par
  • Services quoi ? 5 avril 2005, par


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