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LETTRE D'INFORMATION |

Constitution europ�enne et services publics

lundi 2 mai 2005
par Emanuel Haumant
Dans un pr�c�dent article, nous avons vu comment les services publics devenaient progressivement Services d’Int�r�t Economique G�n�ral (SIEG). Le pr�sent expos� s’int�resse aux �volutions souhait�es par la Commission et aux changements introduits, en la mati�re, par le trait� constitutionnel.

D’abord, �tudions les orientations dict�es par les pr�c�dents trait�s. Selon le livre blanc sur les services d’int�r�t g�n�ral, ces derniers sont d’une « importance cruciale, pour la qualit� de vie des citoyens europ�ens, l’environnement et la comp�titivit� des entreprises europ�ennes » (livre blanc p.3). « Si la fourniture des services d’int�r�t g�n�ral peut �tre organis�e en coop�ration avec le secteur priv� ou confi�e � des entreprises priv�es ou publiques, la d�finition des obligations et missions de service public, en revanche, reste du ressort des pouvoirs publics � l’�chelon appropri� » (livre blanc p.5). « N�anmoins, les fournisseurs de services d’int�r�t �conomique g�n�ral, y compris les fournisseurs de services internes, sont des entreprises et sont d�s lors soumis aux r�gles de concurrence pr�vues par le trait� » (livre blanc p.16). La fameuse concurrence, libre et non fauss�e.
Cette vision s’inspire du dogme lib�ral selon lequel « un march� int�rieur ouvert et concurrentiel, d’une part, et le d�veloppement de services d’int�r�t g�n�ral de qualit�, accessibles et abordables, de l’autre, sont des objectifs compatibles. En effet, la cr�ation d’un march� int�rieur a fortement contribu� � un gain d’efficience, rendant un certain nombre de services d’int�r�t g�n�ral plus abordables. En outre, elle a conduit � un accroissement du choix des services propos�s, particuli�rement visible dans les secteurs des t�l�communications et des transports » (livre blanc p.7). Un argument lumineux. Le secteur de l’�nergie en Californie ou le rail en Grande Bretagne sont des exemples de l’efficacit� du march� � trouver un savant �quilibre entre le maximum de b�n�fices pour quelques uns et le minimum de qualit� de service pour tous [1].

Comment envisager l’avenir avec le trait� constitutionnel ?

Ce que disait l’article 16 du trait� de Rome (article introduit par le trait� d’Amsterdam en 1997) :

Sans pr�judice des articles 73, 86 et 87, et eu �gard � la place qu’occupent les services d’int�r�t �conomique g�n�ral parmi les valeurs communes de l’Union ainsi qu’au r�le qu’ils jouent dans la promotion de la coh�sion sociale et territoriale de l’Union, la Communaut� et ses �tats membres, chacun dans les limites de leurs comp�tences respectives et dans les limites du champ d’application du pr�sent trait�, veillent � ce que ces services fonctionnent sur la base de principes et dans des conditions qui leur permettent d’accomplir leurs missions.

Ce que modifie l’article III-122 du projet de trait� constitutionnel :

Sans pr�judice des articles I-5, III-166, III-167 et III-238, et eu �gard � la place qu’occupent les services d’int�r�t �conomique g�n�ral en tant que services auxquels tous dans l’Union attribuent une valeur ainsi qu’au r�le qu’ils jouent dans la promotion de sa coh�sion sociale et territoriale, l’Union et les �tats membres, chacun dans les limites de leurs comp�tences respectives et dans les limites du champ d’application de la Constitution, veillent � ce que ces services fonctionnent sur la base de principes et dans des conditions, notamment �conomiques et financi�res, qui leur permettent d’accomplir leurs missions. La loi europ�enne �tablit ces principes et fixe ces conditions, sans pr�judice de la comp�tence qu’ont les �tats membres, dans le respect de la Constitution, de fournir, de faire ex�cuter et de financer ces services [2].

On notera que l’Europe ne consid�re plus les services d’int�r�t �conomique g�n�ral comme une valeur mais comme des services auxquels tous dans l’Union attribuent une valeur. On glisse lentement d’une valeur morale � une valeur marchande.
En ajoutant que la loi est maintenant du ressort de l’Union, la Convention est all�e � l’encontre de la position du parlement europ�en et de certains Etats membres : « les participants au d�bat sur le Livre vert sur les services d’int�r�t g�n�ral se sont largement accord�s � dire qu’il n’�tait pas n�cessaire de conf�rer des pouvoirs suppl�mentaires � la Communaut� en ce qui concerne les services d’int�r�t g�n�ral. Sur le principe, la Commission partage cette analyse » (livre blanc p.16). Mais cette derni�re « accueille favorablement la modification de l’article 16 actuel du trait� CE, telle que propos�e par la Convention europ�enne » (livre blanc p.6).
L’ajout effectu� lors de la conf�rence intergouvernementale qui pr�cise que la loi europ�enne "ne porte pas pr�judice � la comp�tence des �tats membres, dans le respect de la Constitution" a sans doute valeur de compromis. On voit mal quelle pourrait �tre la port�e d’une telle disposition, ne serait-ce qu’au regard de l’article I-5 cit� en introduction : « [L’Union] respecte les fonctions essentielles de l’�tat, notamment celles qui ont pour objet d’assurer son int�grit� territoriale, de maintenir l’ordre public et de sauvegarder la s�curit� nationale ».

Les services d’int�r�t �conomique g�n�ral sont directement li�s aux articles III-166 et III-167 qui exposent les r�gles de concurrences du march�. L’article III-238 d�finit la seule exception � ce cadre commercial et concurrentiel : « Sont compatibles avec la Constitution les aides qui r�pondent aux besoins de la coordination des transports ou qui correspondent au remboursement de certaines servitudes inh�rentes � la notion de service public ».
On notera que l’expression service public est pr�f�r�e � celle de service d’int�r�t �conomique g�n�ral dans cet article et celui-l� seulement : Les �tats peuvent subventionner le domaine des transports. Il faut en effet tout mettre en œuvre pour lib�rer la concurrence et garantir que la marchandise circule.

Notons enfin qu’un article de la Charte des droits fondamentaux (partie II de la Constitution) �voque lui aussi les SIEG. Il s’agit du II-96 :
« L’Union reconna�t et respecte l’acc�s aux services d’int�r�t �conomique g�n�ral tel qu’il est pr�vu par les l�gislations et pratiques nationales, conform�ment � la Constitution, afin de promouvoir la coh�sion sociale et territoriale de l’Union ».
L’explication de texte figure � la fin du trait� dans la d�claration concernant les explications relatives � la Charte des droits fondamentaux, article 36 :
« [L’article II-96] est pleinement conforme � l’article III-122 de la Constitution et ne cr�e pas de droit nouveau. Il pose seulement le principe du respect par l’Union de l’acc�s aux services d’int�r�t �conomique g�n�ral tel qu’il est pr�vu par les dispositions nationales, d�s lors que ces dispositions sont compatibles avec le droit de l’Union ».
Dit plus simplement, cet article ne sert � rien. Mais la Convention ayant un objectif de productivit� fix� � 448 articles, il a bien fallu meubler.

Les prochaines �tapes.

Il est tr�s important de distinguer les services de nature �conomique des services de nature non �conomique pour la bonne raison que « la libert� de fournir des services, le droit d’�tablissement, les r�gles relatives � la concurrence et aux aides d’�tat ne concernent, eux, que les activit�s �conomiques » (livre vert p.15).
Selon un arr�t de la Cour europ�enne de justice, « constitue une activit� �conomique toute activit� consistant � offrir des biens et des services sur un march� donn� » [3]. De plus, « la gamme de services pouvant �tre propos�s sur un march� d�pend des mutations technologiques, �conomiques et soci�tales et a chang� au fil des ann�es. Par cons�quent, la distinction entre activit�s �conomiques et activit�s non �conomiques est dynamique et en �volution constante, et un nombre de plus en plus important d’activit�s ont acquis une nature �conomique aux cours des derni�res d�cennies ». Dans cette dynamique, la Commission a soulign�, dans son rapport � l’intention du Conseil europ�en de Laeken, qu’il ne serait ni possible ni souhaitable d’�tablir a priori une liste d�finitive de tous les services d’int�r�t g�n�ral devant �tre consid�r�s comme « non �conomiques ».
Au cours de ces 20 derni�res ann�es les communications, les services postaux, les transports, l’�lectricit� et le gaz ont �t� lib�ralis�s. Entre autres. Les trait�s n’offrant aucune restriction, tout peut devenir un service d’int�r�t �conomique g�n�ral. La Commission pr�sentera d’ailleurs courant 2005 une communication sur les services sociaux et de sant� (mais sans doute apr�s le r�f�rendum). Dans le livre vert, elle n’h�site pas � affirmer que les obligations d�finies pour certaines industries de r�seau pourraient aussi se r�v�ler pertinentes dans le cas des services sociaux (livre vert p.16). Un humanisme hors du commun.
Le trait� constitutionnel ne d�finit aucune limite � la lib�ralisation des services. C’est la jurisprudence de la Cour de justice europ�enne qui exclut l’�ducation nationale et les r�gimes de base de s�curit� sociale obligatoires de l’application des r�gles relatives � la concurrence et au march� int�rieur [4]. Mais cette jurisprudence peut �voluer et si le trait� constitutionnel entre en vigueur, l’Union pourra alors l�gif�rer et, pourquoi pas, remettre en cause cette jurisprudence [5].

Alors que les tenants du oui proclament que le trait� constitutionnel prot�gera nos services publics, ou ce qu’il reste d’op�rateurs historiques, il est pour le moins paradoxal de constater que la r�forme structurelle des services publics n’est pas consid�r�e comme achev�e par la Commission europ�enne. Cette derni�re s’engage � « [r�examiner] la faisabilit� et la n�cessit� d’une loi-cadre relative aux services d’int�r�t g�n�ral lors de l’entr�e en vigueur du trait� constitutionnel » (livre blanc p.13) (car pour la Commission le doute n’est pas de mise, le trait� constitutionnel entrera en vigueur). Rappelons le paragraphe 1 de l’article III-147 : « 1. La loi cadre europ�enne �tablit les mesures pour r�aliser la lib�ralisation d’un service d�termin�. Elle est adopt�e apr�s consultation du Comit� �conomique et social ». La Commission s’engage donc � poursuivre la lib�ralisation des services. L’article III-148 va m�me plus loin puisque « les �tats membres s’efforcent de proc�der � la lib�ralisation des services au‑del� de la mesure qui est obligatoire en vertu de la loi-cadre europ�enne adopt�e en application de l’article III-147, paragraphe 1, si leur situation �conomique g�n�rale et la situation du secteur int�ress� le leur permettent ». Cet article de loi incite les Etats membres � aller au del� de la loi. Mais uniquement dans un sens, celui d’une lib�ralisation accrue.

Et maintenant, La minute n�cessaire de monsieur Cyclop�de :


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[1] Sur l’aventure priv�e du rail britannique, lire le petit guide de la R�forme".

[2] En rouge les ajouts de la convention Giscard, en bleu les ajouts de la conf�rence intergouvernementale.

[3] Arr�t de la Cour de justice dans les affaires jointes C-180 � C-184/98.

[4] Pour ce qui est de l’�ducation, la Cour de justice a estim� que l’�tat, en �tablissant et en maintenant un tel syst�me, n’entend pas s’engager dans des activit�s r�mun�r�es, mais accomplit sa mission dans les domaines sociaux, culturel et �ducatif envers sa population (affaire 263/86, Humbel, Recueil 1988).
Quant aux r�gimes de base de s�curit� sociale obligatoires, la Cour de justice a jug� que les organismes charg�s de la gestion des r�gimes de s�curit� sociale impos�s par l’�tat, tels que l’assurance maladie obligatoire, qui reposent sur le principe de solidarit�, sont � but non lucratif et dont les prestations ne sont pas proportionnelles au montant des cotisations obligatoires, remplissent exclusivement une fonction sociale et n’exercent pas une activit� �conomique (affaires C-159/91 et C-160/91, Poucet, Recueil 1993).

[5] On peut lire � l’article III-315-4b : « dans le domaine du commerce des services sociaux, d’�ducation et de sant� »...

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  • > Constitution europ�enne et services publics 3 juin 2005, par (2 r�ponses)


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