Cuverville
Economie
Article mis en ligne le le 25 /01 /2004
Mode hiver 2004 : qui n’a pas son po�le � p�trole ?
par Charley L.

Comme chaque ann�e en hiver, les supermarch�s pullulent de messieurs-dames encombr�s par des bidons de p�trole qu’ils ram�nent � grand-peine chez eux. Objectif : chauffer, empoisonner toute la famille et pourrir la baraque.

Cette p�nible et noble t�che est encourag�e par le silence int�ress� des marchands d’appareils et de p�trole, ce qui n’a rien de surprenant, et par l’indiff�rence des pouvoirs publics.
Alors posons le probl�me. Il fait froid. Vous n’avez malheureusement pas acc�s au gaz de ville. Vous h�sitez entre installer des convecteurs �lectriques et utiliser ces fameux po�les, dont tout le monde vante la facilit� d’emploi et le faible co�t.

Deux mots de chimie : 1Kg de p�trole lampant br�le en se combinant � 3,5Kg d’oxyg�ne pour fournir 3,1Kg de gaz carbonique, 1,4Kg d’eau... et accessoirement 12KWh de chaleur moite [1]. Autrement dit, quand un po�le a consomm� ses trois litres dans la nuit il a pour cela :
• bouff� 32m3 d’air pur, soit l’int�gralit� de l’oxyg�ne pr�sent dans une pi�ce de 13m2. Mieux vaut ne pas habiter en studio, �a chauffe mieux mais on respire moins bien ;
• rejet� 7,5Kg de CO2, c’est-�-dire 4,1m3, � r�partir entre les poumons des occupants ;
• asperg� les parois froides de quelques 3,3 litres d’eau de condensation (« je comprends pas, j’ai les murs tout moisis, ils doivent �tre poreux ! »).
L’id�al est atteint quand le monsieur �conome et bricoleur a soigneusement calfeutr� les entr�es d’air « qui font rien que des courants d’air froids » [2].

Respirer du CO2 n’est pas terrible mais il y a encore pire. Voil� un extrait de la "fiche-conseil" d’une grande surface sp�cialis�e : "n’oubliez pas un accessoire indispensable pour votre s�curit� : il s’agit d’un d�tecteur de monoxyde de carbone, analysant l’air en permanence, et vous avertissant de la pr�sence de ce gaz inodore, incolore et mortel d� � une mauvaise combustion ! Tous les ans des accidents ont lieu, en particulier quand il fait une temp�rature ext�rieure moyenne, qui r�duit le tirage naturel des conduits de fum�es ou des ventilations naturelles" [3]. La grande surface sp�cialis�e vend po�le et "accessoire", mais s�par�ment. Elle vend aussi les piles n�cessaires � l’accessoire, mais s�par�ment.

Si l’�conomie �tait r�elle, on pourrait comprendre qu’on risque sa vie et sa sant�. Mais l� encore...

Deux mots de physique �conomique. Un litre (800gr) de p�trole donne 9,58KWh [4] et co�te entre 0,6€ (prix de celui « qui n’est pas d�sodoris� », euph�misme que les narines les moins d�licates ont t�t fait de traduire en « celui qui pue ») et 1,4€ [5]. L’�nergie �quivalente en �lectricit� co�te approximativement 0,6€ au tarif heure de nuit et 1€ au tarif heure de jour [6]. Tu parles d’une �conomie.

En fait, l’�conomie vient du caract�re p�nible de l’utilisation du po�le. Si on obligeait les utilisateurs � aller chercher leur �lectricit� quotidienne dans un panier � l’autre bout de la ville. S’ils devaient remplir leur convecteur en en foutant une partie non n�gligeable sur la moquette. Si l’�lectricit� renvers�e puait. Si le samedi soir on devait s’apercevoir que le panier EDF est vide, et que le week-end s’annonce encore plus frais que ce que pr�voit la dame qui remue un bras incertain devant la carte m�t�o de la t�l�. Alors, on ferait bien attention � limiter la chauffe (c’est-�-dire la consommation) pour �viter la corv�e, et l’�lectricit� para�trait moins ch�re.
Bien s�r, on n’oublie pas qu’au bout de la ficelle amenant le confort � la maison il y a une centrale atomique qui pollue dans la discr�tion, et dont la gestion sera peut-�tre bient�t c�d�e au secteur priv�.
C’est pourquoi il est important de garder les poumons propres : pour crier plus fort, m�me dans le vide.




[1] Bilan : p�trole + dioxyg�ne → dioxyde de carbone + monoxyde de carbone + carbone + eau.
Plus pr�cis, si la combustion est compl�te : C12H26 + 18,5 O2 → 12 CO2 + 13 H2O.

[2] Les appareils modernes disposent de s�curit�s pour pr�venir les accidents. Normalement, le fonctionnement du po�le s’arr�te avant que la teneur ambiante en CO2 n’atteigne 0,8%.

[3] Remarque : les dangers relatifs � l’�mission de CO se retrouvent avec le chauffage au gaz naturel, quand la chaudi�re est mal r�gl�e.

[4] Pour ceux qui veulent faire les calculs eux-m�mes : la densit� du p�trole lampant est de 0,8Kg/litre, et sa capacit� thermique sp�cifique de 43100KJ/Kg.

[5] Prix relev�s en grande surface courant janvier 2004.

[6] Calculs moyens de EDF incluant les diff�rentes taxes, et bas�s sur les tarifs en vigueur le 4 juillet 2003.