Les donneurs de le�on

C’est marrant l’actualit�. Un professeur (de math, c’est les pires) se fait punir pour propos raciste envers un �l�ve noir : un mois de prison avec sursis et 1500 euros de dommages et int�r�ts. L’accus� a reconnu avoir interpell� l’adolescent par le terme de « bamboula », mais r�fute le caract�re raciste de la chose. Pour lui, « bamboula » c’est festif. Pourquoi pas disco ? Annie Cordy « chaud chaud cacao » � coup s�r.

Le commentaire de Madame la substitut du procureur concernant la sentence est quasiment du m�me acabit, en plus subtil, en tout cas non intentionnel. « Ce professeur a manqu� � tous ses devoirs. Il est temps pour lui de comprendre que la France est devenue pluriethnique ». Depuis quand la France est-elle devenue pluriethnique ? Depuis que des navigateurs turcs se sont mari�s � des S�gobrigiens pour fonder Marseille ? Depuis que Marie-Antoinette a offert la Lorraine � la France ? Depuis que le capitaine Dreyfus a �t� d�clar� Fran�ais � part enti�re ? Ou depuis que Djamel Debbouze a jou� dans Indig�nes ?

L� encore, comment en vouloir � cette brave magistrate qui, faisant la le�on, a prouv� qu’elle avait un jour appris la sienne ?
En cinqui�me, notamment. Les instructions officielles en g�ographie pour ce niveau de classe mentionnent que l’�tude de l’Afrique doit se faire par la pr�sentation cartographique des « discontinuit�s du peuplement [et de la] diversit� ethnique et culturelle [qui sont] li�es ici plus qu’ailleurs � la zonalit� bioclimatique ». Pauvres Africains ! s’ils savaient que leurs peuples se formaient au gr� des diagrammes ombrothermiques ! Le Tutsi ne serait pas si beau si la pluie ne tombait en abondance sur sa t�te et ses parcelles de manioc. D’ailleurs, si l’on retient le crit�re « pluie », le Tutsi se rapproche du Breton. Alors que le Proven�al tient plus du Maure. C’est d’ailleurs � ce titre que l’ancien maire FN de Toulon, Leuch pour les intimes, coule des jours heureux au Maroc.

Cette culture y a bon Banania nourrit aujourd’hui et nourrira encore au moins cinq ans nos jolies t�tes blondes. Notre bien aim� pr�sident de la r�publique n’a �cop� d’aucune condamnation judiciaire suite � son merveilleux discours de Dakar. « Le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entr� dans l’Histoire. Jamais il ne s’�lance vers l’avenir, jamais il ne lui vient � l’id�e de sortir de la r�p�tition pour s’inventer un destin. » Avec de tels propos, il aurait pourtant pu r�gler — au minimum — la m�me ardoise que l’enseignant bamboulant. Lui aussi a donn� la le�on — cette fois-ci � l’universit�. Il a fait montre d’autorit� devant un parterre d’�tudiants s�n�galais tri�s sur le volet. Le secret d’une autorit�, quelle qu’elle soit, ne tiendrait-il pas � la rigueur inflexible avec laquelle elle persuade les gens qu’ils sont coupables ? [1] Insultes enrob�es de guimauves : son discours a tout de m�me fait voler en �clats les portes de l’amphith��tre.
D’autant que son altesse s�r�nissime ne se pique d’aucun cynisme en invitant l’�l�ve victime et en paraissant « choqu� et touch� » (selon les propres dires du p�re de l’ado). « J’aime l’Afrique, j’aime et je respecte les Africains ». Pour leur c�t� festif ou pour leur naturel joyeux ?

L’ann�e 2007 n’est pas celle de la rupture. Le citoyen n’en tiendra peut-�tre pas imm�diatement rigueur � son Lider maximo : une majorit� trouve son action positive. Il n’a pas toujours de le�on � donner ; il n’a pas non plus l’air d’en recevoir. La m�me majorit� trouve Nicolas le petit d�magogue. Le citoyen poss�de pourtant toute une batterie d’�valuations � sa disposition pour cerner les candidats. Il y a les �valuations diagnostiques. Leur efficacit� est toute relative : il para�t qu’il n’y a pas si longtemps, un homme politique qui avait largement montr� son incomp�tence � l’Economie et � l’Int�rieur durant cinq ans a �t� �lu Pr�sident de la R�publique. L’homme avait trouv� la parade : sa rage a fait son autorit�.
On trouve aussi les �valuations sommatives. Elles arrivent en fin de parcours. 2002 nous a montr� que ce type d’�valuations n’�tait pas encore au point. Il y a enfin les �valuations formatives qui interviennent en cours de parcours. Certains s’auto-�valuent par quelques sondages hagiographiques et r�pandent leurs chiffres pr�fabriqu�s dans des journaux de propagande. D’autres, comme Raffarin aux r�gionales de 2004, sont oblig�s de passer par des �lections � mi-mandat mais l’�chec n’est pas r�dhibitoire. La droite majoritaire, intouchable depuis six ans, a de grandes chances de garder ses maires dans le Var, si bien que la communaut� d’agglom�ration toulonnaise risque un jour de rev�tir un nouveau sigle : TPUMP.

Restent les Suisses qui, par une chaude nuit d’�t�, ont conspu� Doc Gyn�co aux cris de « facho » et de « collabo » et ont par l� m�me fait annuler le concert de ce pauvre artiste � Bandol. Plus localement reste un vilain petit canard, qui lui aussi, se fiche bien de critiquer, donner des le�ons, mettre les pieds dans le plat et tirer sur les ambulances. �a tombe bien : c’est bient�t l’ouverture de la chasse et le lancement des municipales.

[1] paraphrase d’une citation de Raoul Vaneigem.