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LETTRE D'INFORMATION |

Jaur�guiberry : arche de No� ou abri anti-atomique ?

Le retour du Pitalugue (1/ 2)
mercredi 27 octobre 2004
par L�on Gicquel

Cher Hubert. Tu vas dire que Cuverville est d�cid�ment incapable de voir le bon c�t� des choses. Prenons le stadium Jaur�guiberry, par exemple. Tu fais de ce chef d’oeuvre en devenir le fer de lance de ton mandat, le symbole du renouveau toulonnais. Nous te prions donc de bien vouloir accepter nos excuses pour les remarques d�sobligeantes qui suivent. Oh, rien qu’une broutille, un point de d�tail qui m�rite � peine d’�tre cit�.
Ton futur complexe sportif pr�sente la double particularit� de se situer � l’embouchure du lit majeur du Las, et en plein milieu du p�rim�tre nucl�aire de l’Arsenal.

LE nom de Mayol r�sonne aux oreilles de nombreux aficionados. Non pour les airs popularis�s par le fantaisiste, mais pour ceux qui s’�l�vent du temple de l’ovalie toulonnaise quand le Rugby Club appara�t. Le stade de Bon-Rencontre, dans les quartiers ouest, est r�serv� aux footballeurs du Sporting (au moins tant qu’ils resteront en championnat de France amateur). Quant aux basketteurs du HTV, ils naviguent entre l’espace 3000 de Hy�res et les Lices. Mais les clubs de handball, de volley ou les gymnastes ne disposent pas, eux, de grande salle pour venir exprimer leur art devant un public enthousiaste et des �lus survolt�s [1].
Car depuis Maurice Arreckx les politiques aiment le sport. Les �quipes, clubs et associations de supporters participent aux r�seaux �lectoraux : voil� des r�servoirs de voix qu’on ne saurait n�gliger.

Le sport, c’est la sant�.
Hubert Falco titille la fibre sportive de ses concitoyens. Lui-m�me affirme appr�cier l’effort athl�tique et l’odeur de l’animal. Il d�cide donc de pallier le d�ficit d’infrastructures par la construction d’un stadium reprenant le nom de l’amiral Jaur�guiberry.
Les magazines municipaux et intercommunaux, relay�s par notre c�l�bre quotidien varois du matin, vantent les m�rites de cette r�alisation. « A l’entr�e Ouest de la ville, en bordure de l’A50, va �tre construit un Palais omnisports qui servira, en priorit�, aux enfants et adolescents scolaris�s � Toulon (Huit coll�ges � Toulon ; trois coll�ges, un lyc�e et dix �coles primaires et maternelles � proximit� du site). Mais �galement aux associations sportives hors temps scolaire et aux comp�titions sportives de haut niveau » [2].
Jaur�guiberry repr�sente une porte ouverte sur l’occident et Marseille, Un superbe b�timent qui r�v�lera un peu plus d’espace c�tier au regard des toulonnais. « C’est un am�nagement complet de ce secteur Ouest de la ville qui va �tre entrepris par la m�me occasion avec une mise en valeur du patrimoine historique (les douves pr�s de l’autoroute vont �tre �clair�es) et la r�alisation de liaisons permettant un acc�s facile au complexe sportif ».
N’en doutons pas, la situation g�ographique de l’ouvrage contribuera � fluidifier la circulation et le stationnement [3] dans un quartier o� l’urbanisme demeure un mod�le. On sent la fiert� d’une �quipe municipale unie derri�re son maire. « Pour cette r�alisation, Toulon b�n�ficie du plan d�partemental de construction de salles de sports � proximit� des coll�ges mis en place en 1999 par Hubert Falco lorsqu’il �tait Pr�sident du Conseil g�n�ral. Dans le cadre de ce plan, toutes les communes disposant de coll�ges se voient peu � peu dot�es de gymnases et de salles de sport � proximit� de ces coll�ges... Toulon aura bient�t le grand complexe sportif qui lui manque ».

S�curit� est le ma�tre mot des concepteurs. L’�quipement s’inscrit dans un sch�ma d’urbanisation global, et le choix du site a sans doute �t� r�fl�chi au plus haut niveau. On imagine que l’actuel adjoint charg� de l’urbanisme n’a pas d� �tre avare de conseils, en sa qualit� d’ex-directeur de la DDE [4] (du temps o� celle-ci s’occupait de percer le premier tube de la travers�e souterraine de Toulon).

Les architectes, non sans humour, ont choisi pour le palais omnisports une forme de paquebot. Un bateau de verre et de b�ton que les mauvais esprits de Cuverville seraient tent�s de rebaptiser Pitalugue. Quelques explications s’imposent.

Une longue gen�se.
Il faut remonter au temps de Louis XIV pour comprendre les pr�mices du pr�sent projet. Louis, qui veut donner � la Royale un port digne de ce nom en M�diterran�e, demande � l’incontournable Vauban de s’occuper du cas de Toulon. Mais deux cours d’eaux d�bouchent � l’endroit m�me o� sont pr�vues les installations portuaires. C’est tr�s g�nant, car les rivi�res charrient diff�rents mat�riaux qui auraient tendance � envaser le port. Un tirant d’eau insuffisant interdit l’acc�s aux navires. Il est donc propos� de d�tourner le Las et l’Eygoutier de leur cours originel : le Las deviendra la rivi�re Neuve pour retrouver la mer � Lagoubran, et l’Eygoutier prendra la direction des actuelles plages du Mourillon.
Pour forcer le Las � suivre un autre trajet, on construit une digue (dite de Vauban) au niveau du quartier du Jonquet.

L’ancien lit de la rivi�re, fond d’un bassin versant important, sera ensuite canalis� et b�tonn� (laissons aux ing�nieurs le temps d’inventer le b�ton). Et les hommes s’�vertueront � urbaniser ces anciennes zones humides.

Au XXe si�cle quelques noms �voquent encore le pass�, tel celui du quartier du « Pont-du-Las ».
La couverture de la rivi�re Neuve par une voix rapide a sembl� un excellent moyen de canaliser l’eau dans les ann�es soixante-dix.
Et l’ouverture de la travers�e souterraine de Toulon a entra�n� une nouvelle fois le d�tournement d’une rivi�re devenue un sombre pluvial.
A l’ex-embouchure du Las, � proximit� de centraux t�l�phoniques qui g�rent un tr�s grand nombre de communications, les autorit�s militaires ont install� une piscine high-tech pour garder au frais quelques atomes crochus et pomper, pomper, pomper encore ces maudites eaux [5].
Enfin, notons que le secteur accueille aussi le coll�ge Pierre Puget, le seul en France dit-on qui soit inscrit dans un p�rim�tre nucl�aire.
Le r�capitulatif de ce qui pr�c�de, confirm� par la cartographie officielle [6], figure sur le montage ci-dessous.

Avant de partir en retraite de son minist�re de l’Ecologie et du D�veloppement durable, Roselyne Bachelot a laiss� une loi « relative � la pr�vention des risques technologiques et naturels et � la r�paration des dommages ». Le chapitre II du titre « Risques technologiques » compl�te le code de l’environnement sur « la ma�trise de l’urbanisation autour des b�timents � risques ». En particulier, le chapitre L515-8 (� lire sur le site Legifrance) n’a sans doute pas suscit� de fa�on excessive l’int�r�t des b�tisseurs.
C’est normal, car le terrain qui nous occupe et qui appartient � la Marine, 19000 m� mis gratuitement � disposition de la Ville par convention, n’est pas concern� par les risques technologiques mais par les risques nucl�aires. Ne pas confondre.

Et d’ailleurs, le nucl�aire n’est pas un probl�me. On sait depuis Tchernobyl que les autorit�s fran�aises sont capables de dresser d’invisibles mais efficaces barri�res contre tout d�bordement radioactif, par la seule force de leurs d�clarations dans les m�dias. C’est sans doute pour cela que la pr�fecture du Var s’abstient de toute prescription de comprim�s d’iode aux riverains. On se demande d’ailleurs pourquoi l’administration se l�ve le maffre � d�finir des "cercles d’urgence nucl�aire" (en jaune sur l’illustration) et autres "p�rim�tres d’isolement". Vive le risque z�ro, vive le sport.

Le nucl�aire n’�tant pas un probl�me, nous nous int�resserons dans une seconde partie � l’historique des pluies diluviennes dans le Var et au th�or�me toulonnais selon lequel tant qu’il fait beau, il ne pleut pas. Pr�parez les masques et les tubas.

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* Pour des raisons pratiques, le fleuve a �t� d�tourn�.
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[1] On avait pourtant vendu l’id�e de l’Om�ga Z�nith aux Toulonnais dans la perspective, entre autres, d’�v�nements sportifs de haut niveau. On n’en a pas vu beaucoup.

[2] Cet extrait et les suivants : sur le site officiel de la ville de Toulon.

[3] La capacit� d’accueil du complexe est de 5000 places. Un parking de 425 places sera am�nag� � Malbousquet. Dans le polygone d’isolement de la Pyrotechnie ?

[4] Direction D�partementale de l’Equipement.

[5] Pour ceux qui l’ignorent, il y a toujours un r�acteur nucl�aire qui tra�ne en rade de Toulon, qu’il s’agisse d’un sous-marin ou d’un porte-avions Charles de Gaulle. La piscine sert � refroidir le combustible radioactif qui sert � la propulsion des b�timents.

[6] Voir l’indispensable site du Comit� D�partemental d’Information G�ographique.

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  • ... 3 décembre 2005 (1 r�ponse)


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