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LETTRE D'INFORMATION |

L’UDF du Var, entre mythes fondateurs et modernit�

jeudi 30 septembre 2004
par Gilles Suchey

L’UDF a le vent en poupe. Le parti de Fran�ois Bayrou s’affirme comme alternative � l’UMP et attire les mouches. Mais un parti peut-il prosp�rer sur une somme d’individus aux int�r�ts largement divergents ?

D’o� vient l’Union pour la D�mocratie Fran�aise, o� va-t-elle ?

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Daniel Colin
"[Il faut d�noncer] la r�gularisation de la situation de plusieurs centaines de milliers de travailleurs �trangers clandestins venant surcharger les listes d’attente de l’ANPE" (bulletin municipal Vivre � Toulon, d�but des ann�es 80).

Revenons � la source avec deux repr�sentants oubli�s de la vie politique toulonnaise.
Daniel Colin commen�a sa carri�re dans le conseil municipal UDF/PR administr� par Maurice Arreckx, puis devint premier adjoint de Fran�ois Trucy. Il fut aussi d�put� et conseiller r�gional.
Jean-Claude Lunardelli s’assit � l’extr�me droite du maire FN Jean-Marie Le Chevallier quand ce dernier vira Trucy (et Colin, par la m�me occasion). Il fut aussi conseiller r�gional sous le m�me label.
Un d�mocrate respectable et un ultra-r�actionnaire pas franchement pr�sentable, deux fa�ons distinctes de voir le monde ? Pas exactement. Dans leurs vertes ann�es, ces sympathiques toulonnais ont soutenu plus ou moins activement les campagnes �lectorales d’un certain Jean-Louis Tixier Vignancour, et ils ne furent pas les seuls.

De l’antigaullisme au lep�nisme : le giscardisme.
Tixier, mort en 1985, est une figure historique de l’extr�me droite. Avocat engag�, il h�rita d’un poste de secr�taire national adjoint � l’information dans le gouvernement de Vichy en 1940, ce qui ne l’emp�cha pas de continuer sa carri�re apr�s la guerre : dans les ann�es 60, il se sp�cialisa m�me dans la d�fense des militants antigaullistes. Tel Bastien Thiry, auteur de l’attentat dit "du Pont de Seine", ou bien le g�n�ral Salan, putschiste OAS [1].
Ren� R�mond, dans les Droites en France [2], �crit : « le g�n�ral de Gaulle a rencontr� tout au long de sa carri�re politique l’hostilit� irr�ductible, qui alla jusqu’� conspirer son assassinat, d’une coalition de factions qui amalgamait les nostalgiques de Vichy, les victimes de l’�puration, les contempteurs des r�formes de la Lib�ration, les catholiques int�gristes [...], et les fid�les de l’Alg�rie fran�aise. La candidature [aux pr�sidentielles] de Jean-Louis Tixier Vignancour en d�cembre 1965 coagula tous ces ressentiments. Apr�s la disparition du g�n�ral de Gaulle, une fraction de cette opposition de droite, dont l’antigaullisme �tait le ciment et la motivation d�terminante, se rallia � la personne et � la politique de son successeur. Le mouvement se poursuivit apr�s 1974 et plus d’un partisan ardent de l’Alg�rie fran�aise se rangea parmi les soutiens de Val�ry Giscard d’Estaing » [3].

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Maurice Arreckx
"Le racisme n’a rien � voir avec la politique, on l’a dans les tripes. D’ailleurs les arabes sont diff�rents de nous. Ils aiment habiter comme ils habitent. Ils veulent vivre � sept ou huit par chambre. Et ont d’autres habitudes. Allez voir place du th��tre, l� une fran�aise ne peut s’asseoir deux minutes sans que trois arabes arrivent et se mettent � brandir ce qu’ils ont dans le pantalon" (en 1976 dans un journal su�dois).

Au d�but des ann�es 70, Giscard est encore tr�s loin de la r�daction d’une future constitution europ�enne ; il est occup�, � la t�te des R�publicains Ind�pendants (RI), � devenir Pr�sident de la R�publique (1974). L’UDF voit le jour dans la foul�e (1978), tentative aboutie de f�d�rer la droite non gaulliste. Sont recens�s au sein de la nouvelle union : le PR (Parti R�publicain, futur D�mocratie lib�rale), le parti radical valoisien et le CDS (Centre des D�mocrates Sociaux).
Quoi de plus naturel ensuite que le Front national, cr�� par Jean-Marie Le Pen en 72, rallie � sa cause les d��us du giscardisme ? Jean-Yves le Gallou, qui fut d�put� frontiste � Bruxelles [4], �margeait auparavant au PR. Jean-Marie Le Chevallier milita aux c�t�s des RI. Etc.
G�n�reuse, l’UDF version PR accepte aussi les transfuges : l’exemple le plus connu est celui de Yann Piat, r�cup�r�e � la fin des ann�es 80 alors qu’Arreckx pr�side le Conseil g�n�ral du Var. Le vieux Maurice a d’ailleurs d�clar� peu de temps auparavant qu’il pr�f�rait « voir un d�put� du Front national �lu plut�t qu’un d�put� socialiste » [5].

Les r�formateurs au centre.
L’UDF v�hicule pendant 20 ans de chouettes id�es que l’on attribue trop souvent, de fa�on r�ductrice, au seul FN. Particuli�rement dans le Var o� se sont install�s tant de pieds-noirs "chass�s du pays".
Apr�s la d�route d’Arreckx et de Trucy, l’Union devient pestif�r�e. Elle touche le fond avec la cr�ation de l’UMP o� tout le monde s’enfuit, sauf ceux qui ne se voient aucun avenir pr�s de Falco.
Ne pouvant s’emp�cher de tendre la main aux pieds-noirs, Hubert se pince le nez et int�gre quand m�me une repr�sentante de l’UDF � l’ancienne : Ghislaine Rivera, pr�sidente du cercle alg�rianiste toulonnais, d�cid�ment, on n’en sort pas.

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Fran�ois Trucy
"Il y a en ce moment une race qui en chasse une autre, c’est comme les fourmis rouges d’Argentine qui ont chass� les fourmis noires de Provence. Je suis simplement pour le retour des Toulonnais dans Toulon" (Le Monde, 1986).

Puis une bande de jeunes gens audacieux, ignorants du pass� ou amn�siques, motiv�s par les moulinets m�diatiques de Fran�ois Bayrou, d�cident d’investir la section d�partementale sur de nouvelles bases. Gr�ce � de multiples adh�sions, ils s’en emparent. Une femme est �lue pr�sidente : Muriel Bovis. Et un d�nomm� Ali Gharbi prend la t�te des "jeunes UDF". Porter un tel patronyme et int�grer un parti qui mettait un point d’honneur � lutter contre « les fourmis rouges d’Argentine » (voir illustrations) ? Bon courage !

Combien de divisions ?
Le secr�taire de la f�d�ration UDF des Alpes maritimes Rudy Salles, fort de sa position de vice-pr�sident de l’Assembl�e nationale et t�te de liste � la R�gion Paca, a plus ou moins plac� la f�d�ration du Var sous tutelle histoire d’affirmer sa position de m�le dominant. Cela n’arrange pas les affaires de la troupe men�e par Muriel Bovis, mais les anciens applaudissent en faisant tinter leurs bagouzes. Cet entre-deux leur permettra d’organiser la contre-attaque dans l’espoir de r�cup�rer la section. En attendant, c’est la foire d’empoigne � chaque �lection, et les candidats retenus ne font pas forc�ment la gloire de l’UDF nouveau style : Pierre Bonal, candidat aux derni�res cantonales � Toulon, �margeait d�j� au PR quand Arreckx si�geait en mairie. Philippe Ch�teaureynaud, lui, est entr� plus tardivement au parti, apr�s avoir essay� le RPF de Marchiani. Il s’est aussi pr�sent� aux cantonales avant d’interrompre brutalement sa campagne pour cause d’ennuis judiciaires.

Comme si la querelle entre anciens et modernes ne suffisait pas, de nouveaux venus ajoutent � la confusion. Il faut dire que l’UDF version Bayrou est molle du genou. Lib�rale mais pas trop, sociale sans exag�ration. En un mot : centriste. Cela motive les ambitieux qui d�veloppent sans conviction des id�es dont tout le monde se fout, mais qui n’ont pas trouv� ailleurs de cocon politique pour envelopper leur ego.

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Bruno Ravaz
"L’UDF se f�licite de l’�lection du s�nateur Fran�ois Trucy. Cette �lection montre que l’UMP n’est pas h�g�monique � droite et qu’il existe une place dans le Var pour les centristes et les mod�r�s soucieux du progr�s �conomique et social" (au soir de la r��lection de Trucy. Pr�cisons que Trucy porte l’�tiquette UMP depuis 2002. Var matin, 27 septembre 2004).

Bruno Ravaz aurait bien aim� que sa fonction de pr�sident de l’universit� toulonnaise lui permette d’entrer en politique. Las, Hubert Falco l’a d�bout� de sa liste aux derni�res municipales. Plut�t qu’affronter le ministre au sein de l’UMP, il a trouv� plus sympa de prendre sa carte � l’UDF. Puis, b�n�ficiant d’un calendrier favorable et d’une certaine habilet�, il a r�ussi � se faire �lire au Conseil r�gional. Ce n’�tait qu’une �tape : la prochaine pourrait consister en la prise de la f�d�ration varoise avec le soutien de conseillers municipaux d��us de l’UMP... El presidente de l’universit� del sud utilise la fac comme QG de ses ambitions politiques personnelles, mais souffre d’un d�ficit de notori�t�. Falco ceci, Falco cela, maire, pr�sident de TPM, ministre, s�nateur, comment faire pour exister ?

Et Ravaz n’est pas au bout de ses peines. Car s’il veut la section, il devra peut-�tre affronter un autre d�butant centriste : "le grand" Ferdinand Bernhard.
Ferdinand est maire de Sanary, vilain canard qui n’�marge ni � l’UMP, ni � l’agglom�ration TPM. Il n’est pas dans les petits papiers de Falco. Gasp ! Toujours le m�me probl�me ! O� le grand trouvera-t-il sa place ? Il ne va tout de m�me pas prendre sa carte au PS !?
Alors, avec sa directrice de communication Nathalie Bicais [6], il s’est point� � Cogolin � l’occasion de l’universit� d’�t� organis�e par l’UDF. Il envisagerait aussi de reprendre la section, et b�n�ficierait pour cela de l’appui plus ou moins occulte du revenant Colin.

T�moignage de la cacophonie ambiante : Ravaz, au soir de l’�lection s�natoriale, a salu� la victoire de l’UMP Trucy en avouant ing�nument qu’il avait le soutien de l’UDF... Le centriste (?) Philippe Ch�teaureynaud �tait pourtant candidat ! Sans investiture, il est vrai, de Bayrou, Salles ou Bovis.
Le soutien � Trucy incarne-t-il le TSF -Tout Sauf Falco- naissant ? Est-il nostalgique des temps joyeux o� le bon docteur, alors inscrit � l’UDF/PR, d�fendait les valeurs de « progr�s �conomique et social » (voir illustrations) incarn�es sur la c�te par Maurice Arreckx ? Notons que les toulonnais-petits-�lecteurs ne veulent plus entendre parler de Trucy depuis au moins 1995, date � laquelle ils l’ont exclu des affaires municipales. Les institutions fran�aises sont fascinantes, qui permettent � de tels zombies de perdurer en politique sans aucun soutien populaire.

Qui prendra la pr�sidence de l’UDF varois ? Bovis, Ravaz, Bernhard, le lapin du chapeau ? R�ponse avant 2005.

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[1] Rappelons que la ville de Toulon, reconnaissante, a baptis� une place � la gloire du g�n�ral.

[2] Aubier, collection historique, 1982.

[3] A noter : le directeur de la campagne de Tixier en 65 se nommait Jean-Marie le Pen.

[4] Il a ensuite particip� � la scission organis�e par M�gret, et pr�side d�sormais le groupe MNR au Conseil r�gional d’Ile de France.

[5] Il faut bien reconna�tre que la droite h�riti�re de Tixier n’a pas le monopole de la r�cup�ration, ce serait trop simple. La droite gaulliste sait tr�s bien y faire. Voir par exemple les tribulations de Pasqua ou l’accueil chaleureux r�serv� par le RPR au maire de Nice Jacques Peyrat, d�missionnaire du Front au milieu des ann�es 90.

[6] UDF convaincue, d��ue de la politique seynoise.

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  • On a GAGNE 20 mai 2007, par


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